Un blog de plus ! Je ne sais pas s'il durera, je ne sais pas ce qu'il deviendra et, à vrai dire, peu importe... tant que je m'amuse à son élaboration. Le principe est simple : je dédicace un plat à quelqu'un de mon entourage. Plat inventé ou non, taillé sur mesure pour un personnage de roman -Alice, ma plus ancienne complice, accompagnera souvent le voyage, elle en sera un peu le fil rouge- de chanson, de film... un inconnu aperçu sur papier glacé ou en chair et en os... une personne de mon quotidien, mari, fille, chat... un objet ?, bref pour tout ce qui peuple mes paysages intimes. En prime, je glisse quelques clins d'oeil pour souris chercheuse et le tour est joué...

mardi 16 janvier 2007

[La couronne du roi Taor]....................


Voici donc la toute première recette du blog. Le cahier des charges était : brioche, couronne… et pistache, puisque, si vous avez bien suivi l’histoire (voir le premier post de ce blog), Taor, le quatrième roi-mage inventé par Michel Tournier dans son roman Gaspard, Melchior & Balthazar, était un inconditionnel de cette graine. Comme je lui destinais le gâteau, la pistache était parfaitement incontournable, je n’en démordrais pas. J’ouvris des pages du Net, d’autres de mes grimoires, je cherchai... Et en vins à faire une compilation de mes trouvailles (par manque d’expérience, je n’ai pas pensé à noter les liens sur le moment… promis, je ne recommencerai plus ; de toute façon, aucune des recettes glanées n’a été utilisée ici telle que présentée sur le Net). Je mis même le mari à contribution : " dessine-moi une couronne de Taor ! Alllleeeezzz ! Comment ça, tu ne sais pas qui est Taor ? Mais on s’en fiche ! Taor vient de l’Orient, de l’Arabie Heureuse, il a des bijoux et aime le sucre, Taor est un roi en quête. Ça devrait te suffire tout de même ! " et ça lui suffit.

Au bout du compte, le projet aboutit à ça : la brioche serait enrubannée comme la coiffe des rois du tableau, elle formerait une espèce de turban. Son pourtour serait farci d’une frangipane à base non pas d’amandes mais de pistaches, relevée de chocolat. En complémentaire de couleurs et de goûts, au centre, on trouverait toujours la pistache mais, cette fois, dans une compotée d’abricots secs à l’orange. Cannelle et vanille seraient forcément du festin de Taor.

Ci-dessous la recette, et quelques digressions. Peux pas m’en empêcher. La prochaine fois, j’essaierai de pas me laisser aller à un lyrisme débridé. Et je n’y parviendrai certainement pas.




INGREDIENTS

Pâte à brioche
500 grammes de farine
180 grammes de beurre mou
5 œufs
60 grammes de sucre
1 sachet de levure instantanée (3 c à café rases)
200 ml de lait
10 grammes de sel

frangipane
125 grammes de pistaches réduites (ou à réduire) en poudre
50 grammes de beurre mou
60 grammes de sucre
1 œuf
quelques gouttes d’arôme de vanille
20 grammes de chocolat noir râpé
une pincée de sel

compotée d’abricots
100 grammes d’abricots secs
20 grammes de sucre semoule
1 petit bâton de cannelle
10 grammes de pistaches hachées grossièrement
le jus d’une orange

perles de sucre pour la décoration avant cuisson, fruits confits pour après (ils durcissent en cuisant) ; le tout, facultatif.


TECHNIQUES

1 - levain
On prépare un levain levure à la manière de Sandra (Le Pétrin). Dans un bol, on mélange 150 grammes de farine (prélevés sur les 500 g totaux) avec la levure , une cuillère à soupe de sucre et 200 ml de lait. On touille vivement, on obtient une pâte semi-liquide que l’on saupoudre parcimonieusement d’une ou deux cuillères de farine. Un torchon, hop on laisse lever environ 45 mn à température ambiante.

2 – La main à la pâte
On fait une jolie petite fontaine avec le reste de farine (soit ? soit 350 grammes ! bien, y en a un qui suit !). On y ajoute petit à petit les œufs battus et allongés d’une cuillère à soupe d’eau, puis le sucre et le sel… on mêle ces éléments intimement (je m’étais promis d’écrire ça dès ma première recette publiée : « mélanger INTIMEMENT »). On ajoute le levain qui a doublé de volume pendant ses 45 mn de vie. On mélange, on mélange, on mélange… on prend son temps. Et puis on incorpore le beurre, par tout petits morceaux, et par lots de cinq à six petits morceaux. A même le plan de travail, on pétrit bien entre chaque nouvel arrivage de beurre, on apprécie le bruit de la pâte qui fait "chplouirf", le chant du gras au fond des doigts, le soin anti-dessèchement qu’on accorde ainsi à ses menottes. Ensuite ? quand tout le beurre est incorporé ? ben ! ! ! On PETRIT. Comme on peut, comme on veut, le principe étant de tourner la pâte en la soulevant, à moins que ce soit l’inverse, on lui fait brasser de l’air, on l’invite vers soi « viens là » on la repousse sur la table, on la roule, on la reprend, le tout régulièrement, avec autorité jusque dans la douceur, en un rythme soutenu… on joue. Longtemps… surtout quand la pâte est si riche et grasse, il en faut des minutes ; une bonne vingtaine avant qu’elle se décide à émerger de sa mollesse informe et ait assez de répondant pour se défendre et se mettre enfin en boule. C’est alors qu’on la laisse peinarde dans un coin, bien couverte dans un grand saladier.

Pendant que la pâte revoit la fable de la grenouille qui voulait devenir aussi grosse que le bœuf, soit 3 heures environ, on a tout son temps pour ranger un peu et préparer les deux "farces". On commencera par la compotée, moins fragile à la conservation et surtout... sujette à cuisson…

3 - Compotée d’abricots secs au jus d’orange, cannelle et pistaches
Tout benêt ! On colle 100 grammes d’abricots secs coupés menu au fond d’une casserole, on arrose avec le jus d’une orange allongé d’eau pour qu’il y ait un verre de liquide, on se fend d’un bâtonnet de cannelle, on ajoute le sucre, et les pistaches hachées grossièrement au couteau. On laisse cuisotter à feu doux en surveillant vaguement (au nez, c’est faisable) une trentaine de minutes. On ajoute de l’eau au fur et à mesure des besoins des fruits. Au final, on doit avoir des abricots confits et tendres, et plus une goutte de liquide. On peut passer à notre crème de pistaches au chocolat :

4 – Frangipane aux pistaches et au chocolat
Pas de secret, on mélange le beurre tout mou avec la poudre de pistaches, le sucre et la pincée de sel (qui relèvera le goût un peu pâle de la pistache et, paradoxalement, exaltera le sucre), on le fait énergiquement et… ? intimement, oui ! Il faut qu’on croie à les regarder ensuite qu’ils se connaissent de tout temps, tous ces ingrédients. Enfin on ajoute l’œuf, l’extrait de vanille et le chocolat (choisir du puissamment cacaoté) râpé à l’économe. voilà. On filme. Et c’est prêt !


5 - On revient à la brioche
Au bout des trois premières heures de poussée, on reprend la pâte, on la verse de son saladier où elle a pris toute la place, s’est étendue en long large et travers, on la bascule sans ménagement sur le plan de travail. Là, c’est un grand bonheur. Plonger ses mains dans ce qu’elle est devenue est un régal, de douceur, de suavité. L’odeur elle aussi s’est développée, on en profite, on ronronne, on la travaille juste pour le plaisir, quelques minutes, on ne la réveille pas tout à fait, on peut lui chuchoter des histoires à ce moment-là. Quand elle est bien en confiance, pas de pitié, on lui arrache sans plus tergiverser 350 grammes d’un coup. Si. Pas de sensiblerie ! C’est pour son bien. On ne s’arrête pas en si bon chemin, on sépare le reste en deux. (ici, j’ai pu faire deux pâtons de 390 grammes). La première part de pâte formera le milieu de la couronne, les deux autres, le pourtour.

6 – façonnage du centre
On aplatit la première boule en un rectangle avec les paumes de mains (pendant ce temps, on peut mettre les deux autres boules au frais, leur travail en sera simplifié). On y répand la compotée d’abricots sans aller jusqu’aux bords, on laisse environ 2 cm de sécurité, on pose une fève à ce moment (ou/et on le fera dans la tresse aux pistaches). On roule tout ça en un boudin que l’on pince légèrement pour le fermer. On forme un bretzel ou toute oeuvre tarabiscotée de son choix avec ce boudin, on peut tenter un double nœud marin, une coccinelle, un éléphant de mer, afin de former quelque chose de plus ou moins rond pour le centre. On pose délicatement la chose au milieu d’un moule à tarte beurré et fariné. On reprend les deux pâtons déposés au frais.

7 – façonnage du pourtour
On allonge chaque pâton en rectangle d’environ 60 cm. Pour se simplifier la vie, on roule en boudin, que l’on écrase ensuite à la main, sans le déchirer. Même topo que pour le centre, sauf que c’est la frangipane qu’on étale alors en prenant garde de ne pas aller jusqu’aux bords. On roule, on pince. On met face à soi ou - c’est plus pratique - on se met face à ces deux jolis serpents, placés côte à côte, et on les torsade. Délicatement. Assez serrés. Personnellement, je m’en fiche si ça s’ouvre, je trouve ça très joli que l’on voie la garniture, et puis c’est encore une texture différente sous la dent, puisque la partie qui aura cuit à découvert aura un peu caramélisé (j’ai d’ailleurs tout à fait sciemment tartiné le reste de ma frangipane sur la couronne, pour le relief). Mais bon… Normalement, ça ne doit pas s’ouvrir, j’imagine. Ou le moins possible ? allez : le moins possible. Du mieux que vous pourrez. Vous disposez cette jolie tresse dans le moule autour de sa petite sœur à l’abricot. Vous respirez enfin (parce que là, vous venez de vivre un dur moment d’apnée), vous couvrez votre œuvre et la laisser lever encore trois heures.

6 – au feu !
Au bout de ces trois heures, la brioche est prête à être enfournée. On préchauffe donc l’engin à 180 °. On dore la belle enfant au jaune d’œuf minutieusement, on pose en les enfonçant un peu, les perles de sucre. Et c’est parti. On surveille, on couvre précautionneusement d’alu si ça vient à colorer trop avant la fin de cuisson qui, dans mon four, survient environ 35 mn plus tard.

7 – elle est belle !
Ne démoulez pas trop vite ! attendez au moins 20 mn, je dirais 30, que la mie se structure. Je n’ai pas eu le temps cette fois, et le joli dôme formé par le milieu de la couronne en a un peu pâti. Je ne vous l’aurais pas dit, vous ne l’auriez pas su ? oui mais moi si.

Voilà ! ne vous reste qu’à la décorer au gré de vos envies. Là, je voulais que ce soit la couronne du roi Taor, d’où les bijoux, mais c’est loin d’être obligatoire.

8 – miam ?
Avis ? Pas mauvais du tout du tout. Avis des goûteurs ? en vrac : « elle est bonne ta brioche ! » « mmm c’est bien ton truc à l’abricot, là ! et puis ça va bien tout ce machin, ensemble » « y aurait pas de la pistache là-dedans ? » « y en a plus ? ».

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Elle est à tomber ta brioche !!! Les deux sont superbes d'ailleurs. Continues comme ça et vivement la prochaine dédicace !! Feras-tu aussi du salé ?
En tout cas, bienvenue et bon courage pour la suite.

Anonyme a dit…

oui, elle est bien belle et sûrement bien bonne. Tu es une fée. Bonne chance.

Annie a dit…

Eh ! je vous avais pas vus, les raymonde et marco ! Contente qu'elle vous plaise. Merci !

Anonyme a dit…

.. juste rajouter que j'avais bien vu le turban dès que j'ai aperçu la couronne. Et avec les petits bonbons argentés, superbe !

J'ai eu le temps aussi aujourd'hui de lire l'histoire du 4e roi mage (taor). J'adore Michel Tournier mais je n'ai pas lu ce livre encore. Je viens de me procurer " les Météores". J'achète 4 ou 5 livres usagés à chaque semaine mais n'ai le temps que d'en lire un. ET là, tu me donnes envie d'en lire un autre. C'est pas gentil ça :--))

Longue vie à ton blog, il ressort vraiment de l'ordinaire avec toutes ces dédicaces, petites photos, histoires.

Et ton chat derrière l'aquarium, dis-moi, il est en quoi ? Ça semble être une matière bizarre...

Annie a dit…

Merci le ptit bouchon ! je m'en va aller visiter ton chez toi dès que j'aurai répondu aux messages.
Alors alors alors, raymonde...

Ce chat c'est encore toute une histoire. C'est l'illustration de couverture de la version française de "Kafka sur le Rivage" de l'écrivain japonais Haruki Murakami. Je l'ai lu cette année et ne suis pas prête de m'en remettre. C'est mon deuxième livre de vie, après Alice. Ou plutôt, c'est mon Alice pour grandes personnes (est-ce que je suis une grande personne ??????!!!).
Un roman magique dans tous les sens du terme, un grand bonheur, j'en reparlerai. Donc ce chat est bien fait d'une matière bizarre, il est fait de littérature. :)

Anonyme a dit…

Primo, ya pas d'avantages à être une grande personne.

Secondo, Murakami, un japonais, ce doit être bon ! Je vais voir. Ça me fait penser à Totoro (pour enfants et grands enfants) d'un japonnais aussi. Tu connais ? C'est un dessin animé.

Annie a dit…

Non, je ne connais point et non, je n'avais pas deviné que tu étais québécoise.

Anonyme a dit…

Magnifique brioche qui fait très très envie !! faite avec autant d'amour elle doit etre délicieuse. Je vais me laisser tenter a la faire c'est certain, avec autant de précision ca doit etre inratable.

Bonne continuation !