Un blog de plus ! Je ne sais pas s'il durera, je ne sais pas ce qu'il deviendra et, à vrai dire, peu importe... tant que je m'amuse à son élaboration. Le principe est simple : je dédicace un plat à quelqu'un de mon entourage. Plat inventé ou non, taillé sur mesure pour un personnage de roman -Alice, ma plus ancienne complice, accompagnera souvent le voyage, elle en sera un peu le fil rouge- de chanson, de film... un inconnu aperçu sur papier glacé ou en chair et en os... une personne de mon quotidien, mari, fille, chat... un objet ?, bref pour tout ce qui peuple mes paysages intimes. En prime, je glisse quelques clins d'oeil pour souris chercheuse et le tour est joué...

lundi 29 janvier 2007

[Faire suivre le courrier]

AVIS A LA POPULATION !

Pour des raisons pratiques, j'ai décidé, tant qu'il était encore temps, de transférer ce début de blog chez un autre fournisseur, canalblog.
Donc.... à partir de maintenant et dorénavant....
s'adresser à http://dedicacessen.canalblog.com ou cliquer :


A tout de suite.
ps : j'exagère si je vous demande de remettre vos commentaires ? oui, j'exagère.

jeudi 25 janvier 2007

[Mercicotte]

Il y a des annés que je bricole aux fourneaux. Jamais je n'avais osé me lancer dans la pâte feuilletée. Grâce à Mercotte, c'est chose faite. J'ai passé de plus un moment formidable de cuisine, doux et lent. Avec cette première pâte, j'ai concocté les fameuses petites tourtes au veau de la même Mercotte. Sans avoir négligé le plus important : la submerger de questions idiotes. Evidemment. Elle a répondu à tout, très vite et très patiemment. Je lui devais bien un petit quelque chose. Les tourtes ne sont pas encore mangées, mais avec les chutes de pâte, j'ai préparé des feuilletés apéritifs au fromage. C'était juste..... grand ! Dédicace photo donc pour remercier la dame. Ici sa recette immanquable.

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mercredi 24 janvier 2007

["Cœur de café" ou : la liqueur de Ritella]


Voici donc les secrets de la liqueur dédiée à celle qui la première m'accueillit en Puglia, Ritella. J’ai piqué la recette dans 120 boissons à faire soi-même (mais pas les photos, hein ! Elles sont du jour), petit livre d’Isabelle Fréchède ; en y apportant mon grain de sel (nan ! reposez cette salière immédiatement ! C’est juste une façon de parler !) bien sûr. La recette exigeait 200 grammes de café en grains. Je n’en trouvais qu’en gros conditionnement ou hors de prix dans une petite boutique en ville. J’ai regardé de plus près : de toute façon, il faudrait le moudre grossièrement ; j’imaginais bien pourquoi : afin de développer les arômes sans se retrouver avec du dépôt au fond de la décoction. Je me suis dit qu’avec les nouvelles dosettes pour percolateurs qui fleurissent dans tous les rayons de grandes surfaces, ça serait pas plus mal... quoi de mieux ? L’arôme libéré, la mouture enfermée. C’était vendu. J’ai également corsé et parfumé un peu la chose en y ajoutant un peu de cognac.

Ingrédients
250 grammes de dosettes pour percolateurs, pur arabica
75 cl de vodka
2 gousses de vanille
400 grammes de sucre en morceaux
1 petit verre de cognac

Technique
Faire macérer pendant 3 jours les dosettes dans la vodka, avec la vanille, dans un ou des bocaux bien fermé(s). Réaliser un sirop avec le sucre et 25 cl d’eau. Le laisser bouillir 3 mn et le verser sur la macération. Ajouter un verre à liqueur de cognac (à ce moment-là, on peut goûter et décider de remettre quelques dosettes, 3 ou 4 par bocal, pas plus). Laisser reposer encore une semaine en remuant régulièrement. Filtrer et mettre en bouteilles (je fais les vide-greniers pour dégoter des carafes sympas et pas ruineuses).

Verdict : sirupeux et puissant à la fois ; ce qu'on ne peut jamais dire d'un roman.
Et vous ? Vous y connaissez-vous en café ?

[L'ombre de Ritella]


Dès la première nuit. Dès la première nuit, il m’a dit : "il faut que je t’emmène en Italie". 4 mois plus tard, nous y étions, il y a 20 ans maintenant. Le voyage fut plus long que les 4 mois d’attente. 48 heures. Une 104 fatiguée, une remorque, ses parents, Maria qui commençait à ne plus pouvoir marcher, la chaleur qui montait en ce début septembre, le long des autoroutes. Interdiction formelle faite à Giuseppe de prendre le volant, j’avais entendu parler de ses exploits du volant…

On a fait une pause d’une nuit à Cattolica… Petit-déjeuner… c’est quoi cette tasse ? Il est où mon bol ? C’est quoi cette arnaque ? Ces italiens tout de même ! Quoi ? il FAUT que je mette du sucre ? ah non hein. J’ai mis des années à m’en passer… première gorgée. Si. Il FAUT que je mette du sucre. Et ensuite………. Le bonheur. Mon baptême du café, à 22 ans. Epais, long en bouche, le verre d’eau à côté pour ne pas développer la caféine et préserver le goût. Quel nectar… Quelle puissance. Pas d’amertume, le goût qui reste en bouche, fruité et imposant, longtemps. Le sang qui va plus vite dans les veines, mais toujours régulièrement, le réveil des sens et des membres. J’étais déjà accro.

Mon deuxième meilleur-café-de-toute-la-vie entière fut celui de la Ritella. La tata du chéri, la sœur de Giuseppe, toute droite sous ses cheveux en broussaille, sa crinière épaisse de vieille bête, grise au-dessus des sourcils furieux, restés noirs. Elle nous attendait dans l’embrasure de sa porte, tenant le rideau de perles rassemblé à sa gauche, appuyée un peu au mur très blanc. Son petit mari à la Dubout - un Dubout qui aurait dépeint un paysan des pouilles usé par le choc de la bêche sur les cailloux- s’était posé sur le banc de pierre, dans la ruelle pavée. Tout tordu, les yeux allumés encore, sombres et malins. Nous étions arrivés au port. Elle m’a prise contre sa large poitrine odorante de mama, m’a serrée. Elle me parlait en patois de la Puglia, ignorant certainement qu’il existait des coins du monde où on ne comprenait pas sa langue un peu nasale, traînante et chantante. Elle me serrait fort, j’ai compris qu’elle me trouvait belle, elle souriait, et puis elle s’est mise à pleurer. L’émotion, je comprenais vaguement aussi qu’elle me parlait d’une voisine morte… Je ne voyais pas bien le rapport, mais je me laissais aller à son débordement, j’aimais déjà ça, j’étais chez moi, pétrie comme de la bonne pâte, adoptée.

Nous avons dormi là, le chéri et moi, durant les deux semaines de cet été magique. Sous un long et lourd tableau représentant l’Annonciation, je crois, avec à nos chevets des crucifix et en face de nous les photos de tous les chers disparus qui nous guettaient dans la nuit. Bien des pêchés. Les pieds nus sur le marbre, un peu de fraîcheur. Le cri des chiens errants dans la ville, venus de la campagne pour trouver pitance, au milieu de la nuit. Les plages brûlantes. Ce petit restaurant à 13h00, une friture sous ventilateur, seuls dans la grande salle. La procession de la San Rocco, l’image pieuse que la tata me remit se jour-là, le repas de fiançailles improvisé pour nous. Les balades le soir, les penzarotti dégoulinant de mozzarella. Et les baisers. Et les sourires complices. Le repas interminable sous la tonnelle, des merveilles. Les cloches des églises, la litanie du vendeur de légumes qui proposait sa production dans une charrette brinquebalante, sa chanson quotidienne et matinale, la mélodie toujours pareille, rythmée par le tambour des roues sur les pavés inégaux. Et puis les Klaxons qui venaient vite augmenter la symphonie cacophonique. Oui, des souvenirs de feu et de glaces, de découvertes, de siestes et de festins. La simple douceur de vivre.

Malgré les musiques de la rue, nous ne nous levions que vers 9 heures. Quand on descendait, la Ritella était debout depuis longtemps. Elle avait déjà vaqué au ménage, à la lessive, son petit mari sous casquette était aux champs, la sauce des pâtes de 13 heures commençait à ratasser, elle venait sans doute de boire à grandes lampées de l’eau glacée qu’elle entreposait dans un frigo hors d’âge ; dans la bouteille, au centre, le liquide était un glaçon géant. Elle nettoyait la ruelle devant chez elle. Elle criait depuis dehors "il y a du café !". Et quel café. Elle l’avait préparé dans sa petite moka, sur un coin de réchaud. Il était noir comme la nuit, rond comme un fruit, sucré comme du miel et… froid. Il rafraîchissait en même temps qu’il revigorait, il frictionnait sans âpreté aucune, nous étrillait de jour nouveau. Un grand bonheur que ce café-là, presque maternel, qui précédait nos déambulations dans la vallée des trulli.

Cette année, à Noël, j’ai voulu gâter mes invités en leur faisant des cadeaux maison. Parmi ceux-ci, une liqueur au café. J’ai retrouvé, à la goûter en plein hiver, le grand réconfort et la chaleur de ces moments de soleil, à l’ombre des murs charnus, le goût cousin de mes premiers matins d’Italie. Ce sera donc mon hommage à La Ritella, une liqueur qui ressemble à son café béni, du temps des amours naissantes et évidentes. La recette en cliquant ici.


Le soleil des Scorta : roman magnifique, à lire absolument pour se retrouver à la table de Ritella, chez ses cousins et cousines de la Puglia. Cliquez sur l'image pour plus de détails.

vendredi 19 janvier 2007

[ReKKVKVKpitulons donc]....................

Pour plus de clarté, voici les deux couronnes briochées inspirées par le cahier des charges de Sandra, initiatrice du KKVKVK#16. Il suffit de cliquer sur les photos pour être redirigé vers les recettes : La couronne de Taor et Le caprice de la Reine de Coeur.

jeudi 18 janvier 2007

[Le caprice de la Reine de Coeur] ....................

Pour la couronne de la reine de cœur, où il me fallait donc caramel et thé… je me suis inspirée d’une recette trouvée sur le Net, chez Eggs and Mouillettes. J’aime bien les recettes de mamans. A part la manière, je n’ai que peu touché aux ingrédients, me contentant d’ajouter quelques pépites de caramel et de faire infuser un peu de thé (toujours au caramel) dans le lait. Ah si… hem.. j’ai aussi recouvert la brioche d’un nid d’abeilles pompé intégralement dans La Cuisine Des Fées. Bon ça mérite un petit développement, donc.

INGREDIENTS


Brioche
400 g de farine,
125 g de beurre mou,
80 g de sucre,
2 cc de levure instantanée
15 cl de lait
2 sachets de thé au caramel
2 œufs
50 grammes de pépites de caramel (rayon pâtisserie grandes surfaces)
1,5 cc de sel

Nid d’abeilles
50 g d’amandes effilées
25 g de sucre semoule
25 g de miel de fleurs
10 g de beurre
50 g de crème fraîche.

TECHNIQUES

Préparation du levain
On fait bouillir le lait, on y met à infuser les deux sachets de thé au caramel. Quand il est redescendu en dessous de 35° mais est encore tiède, on le mélange dans un saladier au sucre, à la levure et à 50 g de farine prélevés sur la totalité. On couvre et on patiente environ 45 mn.

Pâte et pétrin
On met le reste de farine(350 g) en puits, et on y incorpore les œufs battus en omelette ainsi que le sel. On ajoute le levain. On pétrit le pâton ainsi obtenu une dizaine de minutes. On incorpore enfin le beurre en petits morceaux et en quatre ou cinq fois. On pétrit bien entre chaque incorporation, la pâte semble se défaire, reprend du corps, de la force, se reforme. J’ai pétri à la main, une demi-heure.

Première pousse et repos au frais
On laisse pousser la pâte deux à trois heures.
On la met ensuite sur le plan de travail, on l’aplatit pour la dégazer. On la remet en boule. On la glisse au réfrigérateur pour la nuit en la couvrant avec du film alimentaire.

Apprêt

Au bout de 10 à 12 heures, on renverse la pâte sur la table, elle a pris du volume. On la travaille, la plie, la torture une dizaine de minutes à nouveau. On l'étale avec les mains, sans la déchirer, on y répartit les pépites de caramel et on en fait une boule ; avec deux doigts plantés au milieu de la boule, on atteint le plan de travail, on élargit le trou ainsi creusé, tout doucement, jusqu’à ce qu’il fasse une dizaine de centimètres de diamètre. On essaie de ne pas déchirer la pâte. On introduit la fève depuis le centre.
On couche la couronne ainsi formée sur une plaque recouverte de papier sulfurisé.
Au centre, on pose un bol retourné, généreusement beurré.
On laisse monter pendant 3 à 4 heures.

Cuisson et finitions
On préchauffe le four à 210 °
On dore la brioche au jaune d’œuf, on enfourne, on baisse le thermostat à 180°
On cuit 20 à 25 minutes, si la couronne dore trop vite, on couvre d’aluminium.

Le nid d’abeilles
Dans une casserole, on porte à ébullition la crème fraîche avec le miel, le sucre et le beurre. On laisse bouillir à petit feu une dizaine de minutes en remuant. On ôte du feu, on ajoute les amandes, on mélange délicatement.
On ouvre le four, on augmente le thermostat à 240° (pour éviter un coup de froid à la brioche) et on travaille sur la porte ouverte, au chaud. On recouvre la brioche du nid d’abeilles, délicatement, à la cuillère.
On remet au four, on baisse à nouveau le thermostat à 180 ° et on va laisser environ une dizaines de minutes, en surveillant bien pour que les amandes ne brûlent pas. (si les amandes venaient à être dorées alors que la brioche n’est pas encore cuite, on couvre d’aluminium).
On sort, on attend. SI. On démoule au bout d’une demi-heure. On sort le bol par le bas. Et puis voilà ! Ah non, il reste à décorer ; ici quelques gâteaux vitraux dégotés sur supertoinette et dont je donnerai la recette plus tard, si j’y pense.

Verdict
Pour moi……. Mmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm…… un bonheur, j’en ronronne encore. Et ce nid d’abeilles… quelle gourmandise… Pour la fille ? Plutôt très séduite elle aussi. Le père a préféré celle de Taor. Ce qui ne l’a pas empêché de terminer celle-i au petit-déjeuner.
- Ben ! Je croyais que tu avais préféré l’autre !
- Moui mais bon… fallait bien finir .
Il est trop bon. Ceci dit, elle ne vieillit pas terriblement bien. Elle rassit beaucoup plus que la couronne de mon quatrième roi-mage. A dévorer toute entière le jour-même, donc.

[Qu'on lui coupe la tête !]....................

- Qui est ce "roi " Taorrrrrrrrrrrr ? La voix vibrait dans la nuit.
Je me réveillai en sursaut.
- Hein euh… mais qu’est-ce qui vous prend ?
- Je vous demande qui est ce roi Taorrrrr ! répéta-t-elle d’une voix stridente
- Vous avez vu l’heure ? ? ?
- Répondez !
- Un roi d’ailleurs, d’un autre livre
- Il n’existe pas d’autre liiiivre !
- Oh eh votre majesté, vous vous calmez hein parce que bon, là, j’ai sommeil. Alors on en reparle demain, vous retournez dans votre jardin en papier et vous me laissez dormir.


J’ai appris depuis longtemps à être ferme avec la Reine de Cœur. Je crois que dans le fond, à cause de ça, elle m’aime bien. Et puis de toute façon, j’ai beau m’opposer, je finis toujours par faire ce qu’elle veut. Pas par crainte de me faire couper la tête, après tout ce n’est qu’une carte à jouer, non plutôt pour avoir la paix. La reine de cœur aurait pu être chanteuse d’opéra si seulement elle avait l’oreille musicienne. Elle a le coffre, les décibels, mais pas la mélodie. C’est un calvaire de l’entendre tonitruer. Et la Reine de Cœur ne dort jamais. Ce qui est très embêtant quand il lui vient, comme là, l’envie de quelque chose en pleine nuit. Là, je savais pertinemment de quoi il s’agissait. La Reine de Cœur ne supportait tout simplement pas que j’aie concocté une couronne briochée pour Taor, un autre souverain (elle qui se croit unique) et rien pour elle. La Reine de Cœur est orgueilleuse et gourmande.

- Bon sa majesté, vous vous taisez si je vous promets de vous faire une couronne à vous aussi dès demain ?
- ….
- Oh arrêtez donc un peu de bouder. Vous la voulez comment votre couronne ?
- Dorée !
- Forcément. Mais encore ?
- Je ne sais pas, c’est vous la cuisinière.
- Mmmm… voyons voir…. Qu’est-ce que vous aimez ?
- J’aime les amandes !
- Ah bon ? c’est nouveau ça ?
- Non ! vous ne le saviez pas, voilà tout ! j’aime les amandes, je viens même de décider à l’instant de publier un décret ordonnant à mes sujets de me payer l’impôt en amandes.
- Soit. Ah ! je sais ! une reine aime le thé !
- Oui, cela va sans dire. Le thé, c’est royal.
- Bon, filez, j’ai assez d’éléments pour vous tricoter une couronne.
- Vous avez intérêt à ce que ce soit réussi sinon vous savez ce qu’il vous en coûtera.
- Je sais, je sais, je sais… depuis le temps… On me coupera la tête.
Je ne pus retenir un soupir, assorti d'un haussement d'épaules.

Elle disparut, rouge cerise de fureur. Le bruit du livre qui se refermait me fit penser à celui d’une chouette qui frôle une fenêtre, tard avant l’aube.
Il fallait donc que je me mette au boulot. Ingrédients obligatoires : thé, amandes. Oui mais, me dis-je, on sait bien que la Reine et Alice sont censées ne pas pouvoir s’encadrer mais on sait aussi qu’elles sont inséparables quand il s’agit de papoter autour d'un goûter…. Et Alice n’est qu’une petite fille. L’amertume du thé pourrait la rebuter…. Comment l’atténuer. Le livre sur les genoux, je relus :

" Cependant, ce flacon ne portant décidément pas l’étiquette : " poison ", Alice se hasarda à en goûter le contenu ; comme il lui parut fort agréable (en fait, cela rappelait à la fois la tarte aux cerises, la crème renversée, l’ananas, la dinde rôtie, le caramel, et les rôties chaudes bien beurrées), elle l’avala séance tenante, jusqu’à la dernière goutte. "

Alice trouvait donc fort agréable le goût des cerises. Oui mais ce n’était pas la saison. La crème renversée ? l’ananas ? ça ne m’inspirait guère… La dinde rôtie déjà beaucoup plus mais je craignais que la reine ne trouve l’allusion trop marquée. Les rôties… chaudes… bien BEURREES … mmmm… je ne savais pas trop ce qu’étaient les rôties mais j’imaginais quelque chose de croustillant et sucré… gras, aussi, cela va sans dire… et puis le caramel ! c’était vendu ! La couronne serait au thé au caramel, aux pépites de caramels, et je la recouvrirais d’un nid d’abeilles d’amandes rôties, au miel, beurre et crème.

La chose fut faite. Quand la reine l’aperçut elle poussa un cri de contentement si aigu que le verre des gâteaux bijoux dont j’avais couvert sa couronne, se fendit. Elle est en train d’en manger un morceau au moment où je vous parle…. Je ne sais pas si elle voudra partager avec Alice cette fois. Elle se tait enfin, je crois l’entendre ronronner. Ah mais voilà des petits pas qui accourent sur le bois de la bibliothèque. Alice va s’imposer au goûter royal.

Comment ? Ah oui, où ai-je la tête, on est là pour ça : La recette.

mardi 16 janvier 2007

[La couronne du roi Taor]....................


Voici donc la toute première recette du blog. Le cahier des charges était : brioche, couronne… et pistache, puisque, si vous avez bien suivi l’histoire (voir le premier post de ce blog), Taor, le quatrième roi-mage inventé par Michel Tournier dans son roman Gaspard, Melchior & Balthazar, était un inconditionnel de cette graine. Comme je lui destinais le gâteau, la pistache était parfaitement incontournable, je n’en démordrais pas. J’ouvris des pages du Net, d’autres de mes grimoires, je cherchai... Et en vins à faire une compilation de mes trouvailles (par manque d’expérience, je n’ai pas pensé à noter les liens sur le moment… promis, je ne recommencerai plus ; de toute façon, aucune des recettes glanées n’a été utilisée ici telle que présentée sur le Net). Je mis même le mari à contribution : " dessine-moi une couronne de Taor ! Alllleeeezzz ! Comment ça, tu ne sais pas qui est Taor ? Mais on s’en fiche ! Taor vient de l’Orient, de l’Arabie Heureuse, il a des bijoux et aime le sucre, Taor est un roi en quête. Ça devrait te suffire tout de même ! " et ça lui suffit.

Au bout du compte, le projet aboutit à ça : la brioche serait enrubannée comme la coiffe des rois du tableau, elle formerait une espèce de turban. Son pourtour serait farci d’une frangipane à base non pas d’amandes mais de pistaches, relevée de chocolat. En complémentaire de couleurs et de goûts, au centre, on trouverait toujours la pistache mais, cette fois, dans une compotée d’abricots secs à l’orange. Cannelle et vanille seraient forcément du festin de Taor.

Ci-dessous la recette, et quelques digressions. Peux pas m’en empêcher. La prochaine fois, j’essaierai de pas me laisser aller à un lyrisme débridé. Et je n’y parviendrai certainement pas.




INGREDIENTS

Pâte à brioche
500 grammes de farine
180 grammes de beurre mou
5 œufs
60 grammes de sucre
1 sachet de levure instantanée (3 c à café rases)
200 ml de lait
10 grammes de sel

frangipane
125 grammes de pistaches réduites (ou à réduire) en poudre
50 grammes de beurre mou
60 grammes de sucre
1 œuf
quelques gouttes d’arôme de vanille
20 grammes de chocolat noir râpé
une pincée de sel

compotée d’abricots
100 grammes d’abricots secs
20 grammes de sucre semoule
1 petit bâton de cannelle
10 grammes de pistaches hachées grossièrement
le jus d’une orange

perles de sucre pour la décoration avant cuisson, fruits confits pour après (ils durcissent en cuisant) ; le tout, facultatif.


TECHNIQUES

1 - levain
On prépare un levain levure à la manière de Sandra (Le Pétrin). Dans un bol, on mélange 150 grammes de farine (prélevés sur les 500 g totaux) avec la levure , une cuillère à soupe de sucre et 200 ml de lait. On touille vivement, on obtient une pâte semi-liquide que l’on saupoudre parcimonieusement d’une ou deux cuillères de farine. Un torchon, hop on laisse lever environ 45 mn à température ambiante.

2 – La main à la pâte
On fait une jolie petite fontaine avec le reste de farine (soit ? soit 350 grammes ! bien, y en a un qui suit !). On y ajoute petit à petit les œufs battus et allongés d’une cuillère à soupe d’eau, puis le sucre et le sel… on mêle ces éléments intimement (je m’étais promis d’écrire ça dès ma première recette publiée : « mélanger INTIMEMENT »). On ajoute le levain qui a doublé de volume pendant ses 45 mn de vie. On mélange, on mélange, on mélange… on prend son temps. Et puis on incorpore le beurre, par tout petits morceaux, et par lots de cinq à six petits morceaux. A même le plan de travail, on pétrit bien entre chaque nouvel arrivage de beurre, on apprécie le bruit de la pâte qui fait "chplouirf", le chant du gras au fond des doigts, le soin anti-dessèchement qu’on accorde ainsi à ses menottes. Ensuite ? quand tout le beurre est incorporé ? ben ! ! ! On PETRIT. Comme on peut, comme on veut, le principe étant de tourner la pâte en la soulevant, à moins que ce soit l’inverse, on lui fait brasser de l’air, on l’invite vers soi « viens là » on la repousse sur la table, on la roule, on la reprend, le tout régulièrement, avec autorité jusque dans la douceur, en un rythme soutenu… on joue. Longtemps… surtout quand la pâte est si riche et grasse, il en faut des minutes ; une bonne vingtaine avant qu’elle se décide à émerger de sa mollesse informe et ait assez de répondant pour se défendre et se mettre enfin en boule. C’est alors qu’on la laisse peinarde dans un coin, bien couverte dans un grand saladier.

Pendant que la pâte revoit la fable de la grenouille qui voulait devenir aussi grosse que le bœuf, soit 3 heures environ, on a tout son temps pour ranger un peu et préparer les deux "farces". On commencera par la compotée, moins fragile à la conservation et surtout... sujette à cuisson…

3 - Compotée d’abricots secs au jus d’orange, cannelle et pistaches
Tout benêt ! On colle 100 grammes d’abricots secs coupés menu au fond d’une casserole, on arrose avec le jus d’une orange allongé d’eau pour qu’il y ait un verre de liquide, on se fend d’un bâtonnet de cannelle, on ajoute le sucre, et les pistaches hachées grossièrement au couteau. On laisse cuisotter à feu doux en surveillant vaguement (au nez, c’est faisable) une trentaine de minutes. On ajoute de l’eau au fur et à mesure des besoins des fruits. Au final, on doit avoir des abricots confits et tendres, et plus une goutte de liquide. On peut passer à notre crème de pistaches au chocolat :

4 – Frangipane aux pistaches et au chocolat
Pas de secret, on mélange le beurre tout mou avec la poudre de pistaches, le sucre et la pincée de sel (qui relèvera le goût un peu pâle de la pistache et, paradoxalement, exaltera le sucre), on le fait énergiquement et… ? intimement, oui ! Il faut qu’on croie à les regarder ensuite qu’ils se connaissent de tout temps, tous ces ingrédients. Enfin on ajoute l’œuf, l’extrait de vanille et le chocolat (choisir du puissamment cacaoté) râpé à l’économe. voilà. On filme. Et c’est prêt !


5 - On revient à la brioche
Au bout des trois premières heures de poussée, on reprend la pâte, on la verse de son saladier où elle a pris toute la place, s’est étendue en long large et travers, on la bascule sans ménagement sur le plan de travail. Là, c’est un grand bonheur. Plonger ses mains dans ce qu’elle est devenue est un régal, de douceur, de suavité. L’odeur elle aussi s’est développée, on en profite, on ronronne, on la travaille juste pour le plaisir, quelques minutes, on ne la réveille pas tout à fait, on peut lui chuchoter des histoires à ce moment-là. Quand elle est bien en confiance, pas de pitié, on lui arrache sans plus tergiverser 350 grammes d’un coup. Si. Pas de sensiblerie ! C’est pour son bien. On ne s’arrête pas en si bon chemin, on sépare le reste en deux. (ici, j’ai pu faire deux pâtons de 390 grammes). La première part de pâte formera le milieu de la couronne, les deux autres, le pourtour.

6 – façonnage du centre
On aplatit la première boule en un rectangle avec les paumes de mains (pendant ce temps, on peut mettre les deux autres boules au frais, leur travail en sera simplifié). On y répand la compotée d’abricots sans aller jusqu’aux bords, on laisse environ 2 cm de sécurité, on pose une fève à ce moment (ou/et on le fera dans la tresse aux pistaches). On roule tout ça en un boudin que l’on pince légèrement pour le fermer. On forme un bretzel ou toute oeuvre tarabiscotée de son choix avec ce boudin, on peut tenter un double nœud marin, une coccinelle, un éléphant de mer, afin de former quelque chose de plus ou moins rond pour le centre. On pose délicatement la chose au milieu d’un moule à tarte beurré et fariné. On reprend les deux pâtons déposés au frais.

7 – façonnage du pourtour
On allonge chaque pâton en rectangle d’environ 60 cm. Pour se simplifier la vie, on roule en boudin, que l’on écrase ensuite à la main, sans le déchirer. Même topo que pour le centre, sauf que c’est la frangipane qu’on étale alors en prenant garde de ne pas aller jusqu’aux bords. On roule, on pince. On met face à soi ou - c’est plus pratique - on se met face à ces deux jolis serpents, placés côte à côte, et on les torsade. Délicatement. Assez serrés. Personnellement, je m’en fiche si ça s’ouvre, je trouve ça très joli que l’on voie la garniture, et puis c’est encore une texture différente sous la dent, puisque la partie qui aura cuit à découvert aura un peu caramélisé (j’ai d’ailleurs tout à fait sciemment tartiné le reste de ma frangipane sur la couronne, pour le relief). Mais bon… Normalement, ça ne doit pas s’ouvrir, j’imagine. Ou le moins possible ? allez : le moins possible. Du mieux que vous pourrez. Vous disposez cette jolie tresse dans le moule autour de sa petite sœur à l’abricot. Vous respirez enfin (parce que là, vous venez de vivre un dur moment d’apnée), vous couvrez votre œuvre et la laisser lever encore trois heures.

6 – au feu !
Au bout de ces trois heures, la brioche est prête à être enfournée. On préchauffe donc l’engin à 180 °. On dore la belle enfant au jaune d’œuf minutieusement, on pose en les enfonçant un peu, les perles de sucre. Et c’est parti. On surveille, on couvre précautionneusement d’alu si ça vient à colorer trop avant la fin de cuisson qui, dans mon four, survient environ 35 mn plus tard.

7 – elle est belle !
Ne démoulez pas trop vite ! attendez au moins 20 mn, je dirais 30, que la mie se structure. Je n’ai pas eu le temps cette fois, et le joli dôme formé par le milieu de la couronne en a un peu pâti. Je ne vous l’aurais pas dit, vous ne l’auriez pas su ? oui mais moi si.

Voilà ! ne vous reste qu’à la décorer au gré de vos envies. Là, je voulais que ce soit la couronne du roi Taor, d’où les bijoux, mais c’est loin d’être obligatoire.

8 – miam ?
Avis ? Pas mauvais du tout du tout. Avis des goûteurs ? en vrac : « elle est bonne ta brioche ! » « mmm c’est bien ton truc à l’abricot, là ! et puis ça va bien tout ce machin, ensemble » « y aurait pas de la pistache là-dedans ? » « y en a plus ? ».

[Coup d'envoi]....................

Depuis le temps que ça me chatouillait... Il a fallu un KKVKVK pour que je me lance. Oui mais voilà... Pourquoi entreprendre ce que des dizaines font déjà bien mieux que moi ? Je ne suis pas aussi expérimentée que la plupart des bloggeuses. Je cuisine depuis longtemps maintenant pourtant, mais avec si peu de science, instinctivement la plupart du temps ; par transmission aussi, j'ai hérité du tablier bleu à fleurs de ma grand-mère et n'ai pas intérêt à faillir à la réputation de cordons bleus des femmes de la famille. Je vais avoir 42 ans, et je me souviens avoir fait mon premier gâteau, toute seule comme une grande à l'âge de 13 ans. Avant ça, bien sûr, j'avais tripatouillé les casseroles pour aider ma mère, en Cuisine Accompagnée en quelque sorte. Mais cet après-midi-là, j'étais seule et déjà, je cuisinais en secret, en surprise, pour quelqu'un d'autre. Pour ma mère, obligée de retourner à l'usine à la mort de mon père. Je voulais lui redonner un peu de la douceur perdue. Je crois que c'est toujours mon but quand je cuisine : le retour à l'insouciance. J'aime penser à une personne que je bercerais, caresserais, toucherais ainsi. Quelqu'un qui, en mangeant mon plat, me mange un peu et en tire, je l'espère, un peu de réconfort.

Je me trouvais donc devant les deux premières contraintes fondatrices : cuisiner pour ; essayer d'aborder les choses différemment et autrement que par la technique où je n'ai rien à apporter.

Certes.

Je ne trouvais pas. Je me suis donc laissée aller à penser tout bêtement au KKVKVK lancé par Sandra. Elle voulait une couronne des rois. Une couronne briochée. mmmmm... j'en salivais d'avance. Non pas à l'idée de la manger mais à celle de la préparer. J'ai un amour profond pour le touillage de pâte. J'aime coller mes doigts dedans, la pétrir, m'enfoncer, la caresser, la maltraiter, c'est un moment de détente formidable, on devrait lancer ça comme méthode de thérapie, en remplacement de toutes les sophrologies-yogatistes existantes. Le pétrissage est un acte hautement sensuel, je ne l'apprends à personne. Commencer mon blog comme ça ne pouvait que me séduire. J'y pensais, j'y pensais...

Couronne des rois... les trois rois-mages... trois ? N'avais-je pas entendu parler d'un quatrième ? Mais si ! Par Michel Tournier dans "Gaspard, Melchior & Balthazar" ! Direction ma bibliothèque où je finis par retrouver la chose, entre La Naissance des Fantômes de Marie Darrieussecq et Black Boy de Richard Wright, ce qui est une preuve incontestable, s'il en fallait encore, de mon sens inné du classement. Le quatrième Roi, donc... Tounier l'a appelé Taor, prince de Mangalore... Selon lui, ce quatrième roi se serait mis en route, non à la recherche de l'enfant, mais à celle du... rahat-loukoum à la pistache !

En effet, "le prince Taor Malek ne mettait rien au-dessus de l'art de la pâtisserie, et de tous les ingrédients utilisés par ses chefs, c'était aux graines de pistache qu'allait sa préférence. Il avait même fait planter dans ses jardins un bois de pistachiers, auquel il accordait tous ses soins." Voici donc Taor parti à la recherche de ce trésor à peine goûté en son royaume... Voyage initiatique en deux parties : la première (trop) sucrée comme du miel, la seconde rongée par le sel, les deux toujours à quelques encablures de Jésus... Finira-t-il par trouver l'apaisement ? où le mènera sa quête ? Je n'en dirai rien, à vous de lire.

En attendant, pour ce roi Taor, il m'était venu la furieuse envie de faire une couronne orientale et embijoutée, personnalisée, pleine de cette pistache qui le mit en route et finit par lui faire trouver bien autre chose que la gourmandise convoitée.

La première recette du blog était ébauchée, le principe général défini...